Je n’ai pas l’intention d’être le Rimbaud de notre époque. Je n’irai pas crever à Marseille et je mets au défi n’importe quel chirurgien de m’amputer. Ce qui m’importe est de mutiler esthétiquement le style, me référer en filigrane à Corbière, rester fidèle à Mallarmé, cultiver des tics à la Baudelaire, emmerder le monde en parlant de mes problèmes au centre de la constellation desquels scintille la mort. J’ennuierai. Soit. J’en prends mon parti.
Tous mes poèmes sont de circontance. Ceux qui auront la patience de les lire verront qu’il s’agit de poésie engagée, mais dans le cours d’un incessant délire. Je me flatte de ne jamais déssaouler. Il en résulte dans les perspecives des distorsions étranges. Des obsessions et fatalement des clichés. La mort partout présente, par exemple. Et mes cieux gris des Flandres. Bref de quoi lasser les lecteurs. N’ayant nulle pudeur et aucune ambition, il m’indiffère de savoir ce que l’on pense et de quelle manière on juge la poèsie que je produis. Ma produciton de poèmes n’est qu’une petite industrie aux frontières de l’artisanat. J’écris. Ma femme ramasse, épars dans l’appartement, mes brouillons et les dactylographie. Parfois, je me relis quelques années plus tard. Lorsque cela se trouve je me corrige, sans nulle joie ni plaisir. La vie a pour moi peu d’intérêt. Puissé-je contaminer mes lecteurs. Je suis porteur du virus qui détruit n’importe quelle forme d’intérêt.